On me demande souvent comment savoir si le prix d’un appartement est le “bon prix”. Cette question m’a toujours intriguée : existe-t-il un juste prix pour un bien immobilier ou ce prix n’est-il simplement pas le résultat de la confrontation de l’offre et la demande?
Pour tenter de répondre à cette question, il est nécessaire d’analyser le marché de l’immobilier résidentiel. Mais l’immobilier est un marché particulier : les biens immobiliers sont des actifs immobiles, peu liquides (il faut du temps pour vendre un appartement), et non fongibles (deux appartements ou deux maisons ne sont jamais identiques). Alors comment savoir quel est le juste prix d’un bien immobilier ?
Logements neufs vs logements anciens
Afin de savoir s’il existe un juste prix, il faut commencer par préciser de quel marché nous parlons. Le marché immobilier, comme beaucoup d’autres marchés, est en effet composé de deux sous marchés :
• un marché primaire (immobilier neuf): ce sont les biens immobiliers qui viennent d’être créés ou qui sont en cours de création. L’acquéreur est le premier propriétaire.
• un marché secondaire (immobilier ancien), dans lequel les biens ont déjà été vendus une première fois et sont revendus.
Dans le marché de l’immobilier neuf (marché primaire), un acquéreur achète un bien au prix de vente fixé par le promoteur. Dans ce cas de figure, il est très difficile (voire impossible) de déterminer la valeur intrinsèque du bien, le prix de vente pouvant être décomposé de la manière suivante : coût de production du bien + marge du constructeur (promoteur) + marge du revendeur (conseiller en gestion de patrimoine, site de vente d’immobilier neuf, etc…). La notion de juste prix n’existe donc pas vraiment puisqu’aucune négociation n’est possible.
Dans le marché de l’ancien (marché secondaire), un acquéreur achète généralement un bien à sa valeur de marché. Mais comment savoir si la valeur de marché est bien égale au juste prix ? Tentons de répondre à cette question pour le marché de l’immobilier résidentiel ancien.
De la théorie à la pratique
Le prix théorique d’un bien immobilier dépend de nombreux paramètres : localisation, état général, caractéristique, rareté, revenus dégagés par le bien, etc… La création d’un modèle pour calculer le juste prix d’un bien immobilier est donc très complexe, chaque bien immobilier étant différent (non fongibilité du marché immobilier). Certains sites tentent, depuis nombreuses années, de créer des modèles pour évaluer le prix d’un bien, mais la pratique montre que ce genre de modèles correspond rarement à la réalité.
Une autre façon de voir les choses est d’appliquer une des théories des marchés financiers : l’efficience des marchés. Cette théorie dit que si tous les investisseurs disposent de toutes les informations pertinentes au sujet d’un actif, le prix de marché de cet actif est égal au juste prix. En appliquant cette théorie à l’immobilier, si tous les acquéreurs disposaient de toutes les données et informations pertinentes relatives à un bien, alors la valeur de marché du bien serait égale au juste prix.
En pratique cela n’est pas forcément vrai car le marché de l’immobilier est très différent des marchés financiers et il y a, en plus, deux types d’acquéreurs d’immobilier résidentiel : ceux qui achètent leur résidence principale et ceux qui achètent des biens immobiliers uniquement dans le but de les louer (immobilier commercial). Il est assez facile de voir que celui qui achète sa résidence principale, motivé par des considérations affectives, va pouvoir acheter un bien plus cher que le prix de marché. A l’inverse, l’investisseur achètera lui au prix du marché ou en dessous. La notion de valeur affective vient donc biaiser le fonctionnement des marchés immobilier.
En fin de comptes, il n’y a probablement pas de juste prix dans l’immobilier, mais un prix de marché établi par l’offre et la demande. Rendre le marché immobilier secondaire plus efficient passera donc par le regroupement des investisseurs (sans valeur affective), la mise à disposition de toutes les données et informations relatives aux biens, et la mise en place d’un système permettant l’établissement du juste prix par la confrontation transparente entre l’offre et la demande.